Non mais alors, pour qui tu me prends pétasse, ou l'art de ne plus supporter son slip.

La moiteur de l'air, l'orage qui gronde, le vent salvateur, une soirée d'été. Un repas, les pieds en éventail. Une discussion anodine. Et soudain, l'intrus. Une mouche. Un bruit, un bourdonnement puis une gêne incessante. L'homme est sous tension. Bzzz, Bzzz. Elle tournoie, virevolte, va et vient, repars et reviens. La conversation est coupée nette. Des yeux impatients suivent la trajectoire folle, aléatoire, dissonante. Où est la tapette? A portée de mains... Elle ne s'arrête pas. Le traqueur est désemparé. L'instinct grégaire se réveille. Le mâle se prépare à la guerre. Bzzz. Bzzz. Grrr, entend t-on comme simple réponse, comme une invitation à l'affrontement. Elle s'arrête. Suspendue à un objet léger et fragile. Osera t'il l'attaquer sur ce terrain? Oui. Tapeeeeeee. Un gros coup de tapette s'abat sur l'objet. Quelques secondes et ... Bzzzz. Elle reprend, de plus belle. L'homme est aux 400 coups. Ses yeux noirs révulsent. Ses oreilles ne bourdonnent plus, elle sifflent. Tous ses sens sont aux aguets. La bras en l'air, le geste en suspend. Elle finira bien par s'arrêter. Et c'est ce qu'elle fait. Posée sur une surface plane, insouciante. Retapeeeeeee. Elle reçoit soudainement le coup fatal et aura pour seule oraison funèbre: "Non mais alors, pour qui tu me prends pétasse". D'un geste dédaigneux, l'homme prend son petit corps frêle pour le lancer dans la poubelle. "Oh, et puis je ne supporte plus ce slip", conclut-il. La moiteur de l'air, l'orage qui gronde, le vent salvateur, une soirée d'été...